Parallèlement à leurs aventures des livres pour enfants, Rita et Machin font cette semaine leur cinéma à travers un film d’animation au graphisme minimaliste et à la joie de vivre communicative. Rencontre avec l’un des deux “papas” des héros.

Elle, c’est Rita, une petite fille énergique au caractère bien trempé. Lui, c’est Machin, son chien paresseux et farceur. Leurs aventures, imaginées par Jean-Philippe Arrou-Vignod et l’illustrateur Olivier Tallec chez Gallimard Jeunesse, trouvent aujourd’hui le chemin du cinéma. A travers dix segments et autant de petites intrigues du quotidien (la piscine, la plage, le pique-nique, une escapade à Paris…), on retrouve l’esthétique épurée des livres, dont la patte s’inspire notamment des graphismes japonais, ainsi que l’humour et la légèreté de ces deux personnages attachants. A l’occasion de la sortie des Aventures de Rita et Machin cette semaine en salles, nous avons rencontré l’auteur Jean-Philippe Arrou-Vignod.

AlloCiné : Parlez-nous de la création de “Rita et Machin”, qui a débuté… par le chien ?

Jean-Philippe Arrou-Vignod : Les deux personnages sont nés en même temps sous le crayon d’Olivier Tallec, comme un vrai duo. Il ne restait qu’à leur trouver un nom pour qu’il commencent à vivre des aventures en commun.  D’habitude, j’imagine une histoire, je l’écris et un illustrateur s’en empare. Avec Rita et Machin, c’est tout l’inverse : mon inspiration a été déclenchée par les petits personnages croqués par Olivier.

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Pourquoi avoir opté pour cette approche graphique minimaliste et “japonisante” ? Qu’apporte t-elle à ces deux personnages ?

Olivier est un formidable coloriste. Son travail, jusqu’alors, le portait davantage vers des illustrations peintes. Avec Rita et Machin, il a eu l’envie d’aller vers quelque chose de plus jeté qui transcrive l’énergie débordante de nos deux inséparables. D’où ses illustrations au trait, et le choix minimaliste du rouge, du noir et du blanc pour seules couleurs, qui donnent à la série d’albums une identité graphique très particulière.

Comment fonctionne votre duo avec Olivier Tallec ?

Nous sommes amis depuis longtemps et nous partageons, je crois, un même sens de l’humour. On commence par rêver ensemble à une situation qui nous amuse, puis je rentre chez moi et j’écris. Olivier lit mon histoire, puis il la met de côté, le temps de se détacher des mots pour la voir en images et éviter les redondances. Nous faisons ce ping-pong entre nous jusqu’à ce qu’il nous semble que s’est établi un vrai jeu entre le texte et les images.

D’où vous vient l’inspiration pour les aventures de vos héros ? De vos observations en tant que parents ? De vos souvenirs d’enfance ? De votre relation aux animaux et/ou de celles de vos enfants ? 

Nous avons en commun, Olivier et moi, d’être issus d’une famille nombreuse. Mais nous n’avons pas de sœur, et nous n’avons jamais eu de petit chien. Rita et Machin viennent peut-être de ce regret que nous partageons.

Les livres ont trouvé un ton très particulier entre naïveté enfantine et humour. Comment aborde t-on l’humour quand on s’adresse aux petits ?

Il faut tenter d’écrire à hauteur d’enfance. De se rappeler ce qui nous touchait, nous surprenait ou nous amusait quand nous étions petits. Olivier et moi, je crois, avons gardé un lien très fort avec les émotions de ce temps-là. Nous essayons d’enchanter des situations simples de la vie quotidienne, que tous les enfants connaissent, mais qui deviennent magiques quand on les vit en complicité avec un animal de compagnie.

Quelle a été votre réaction quand NHK vous propose une adaptation cinéma ? Cela peut sembler étonnant que cette proposition cinéma émane du Japon et pas de sociétés françaises. Comment est reçu le livre là-bas ?

Il y a eu plusieurs projets de producteurs français, qui n’ont pas abouti. Les Japonais, très séduits par le graphisme d’Olivier, sont allés jusqu’au bout. Ils ont traduit nos livres avec succès, développé toute une gamme d’objets à l’effigie de Rita et Machin et produit une saison de dessins animés. Ce qui leur plaisait ? L’univers très “Kawaii” et le charme français du cadre, très en vogue au Japon.

Comment avez-vous été impliqués sur le film ?

Olivier a travaillé à établir la charte graphique. Pour ma part, j’ai validé chacun des scénarios et des dialogues du film. Le producteur souhaitait respecter au mieux notre univers, et nous avons travaillé avec lui dans les meilleures conditions. Même si, à un moment, on ne peut tout contrôler : les contraintes de la production industrielle obligent à lâcher prise pour ne pas retarder ou compromettre toute l’entreprise.

Quelle a été votre première réaction en voyant vos personnages prendre vie ?

Celle que procure, je crois, toute adaptation : un mélange d’émotion à voir nos personnages s’incarner, bouger, parler, et un léger sentiment de dépossession, comme s’ils nous échappaient définitivement pour vivre de leurs propres ailes.

Chaque lecteur entend à sa manière la voix des personnages. Le cinéma oblige à choisir une voix. Avez-vous eu votre mot à dire sur la VF (et même la VO) ?

Nous avons été invités à choisir, dans un casting audio, celles qui nous semblaient les plus proches des voix imaginaires que nous avions en tête pour Rita et Machin. Pas facile, pour le moins ! Mais je trouve qu’au final, c’est plutôt réussi.

Le segment “à Paris” était un hors-série. Et il est un peu à part aussi dans ce film. Est-ce qu’il a une saveur particulière pour vous ? Précisons d’ailleurs qu’il s’agit de notre segment préféré…

C’est un album particulier pour nous. D’abord parce que c’est un grand format, afin de permettre à Olivier de laisser libre cours à son talent de paysagiste. Ensuite, parce que nous avons conçu cet album à rebours des autres : c’est Olivier qui a illustré très librement les scènes qui lui venaient en tête, et je n’ai écrit l’histoire qu’ensuite. Une des trouvailles dont nous sommes très fiers (et qui a disparu malheureusement dans le film), c’est que Rita et Machin se retrouvent à un moment au milieu d’une immense manifestation ! Un aspect typique de la vie parisienne rarement représenté dans un album jeunesse et qui a beaucoup fait rire nos lecteurs à travers le monde.

Comme les livres, le film parvient à rester constamment sur le fil d’une naïveté au sens positif du terme, sans le cynisme qu’on peut retrouver dans certaines productions animées. C’était important pour vous de respecter ce parti pris ?

Oui. L’équilibre de la série repose sur un mélange de fraîcheur, d’humour décalé et de poésie qui, je crois, touche les enfants mais ravit aussi les adultes. Il nous semblait crucial que cela transparaisse dans l’adaptation, ce qui est le cas, je trouve.

Dernière question… pourquoi le chien s’appelle Machin ?

Machin, pour Rita, est-il un chien ? Un doudou tout mou ? Un petit frère qui marche sur deux jambes, parle avec elle et sait pousser un caddie de supermarché ou jouer au foot ? Un peu tout ça. C’est donc un… machin, un bidule difficile à nommer. Et puis, lui opposer le prénom hyper féminin et décidé de Rita nous a paru créer d’emblée un contraste amusant, prometteur d’histoires et de tendres disputes.

Les Aventures de Rita & Machin, au cinéma cette semaine

Les Aventures de Rita et Machin Bande-annonce VF