Mis en lumière par des faits divers tragiques comme l’affaire Véronique Courjault et ses trois bébés retrouvés congelés à son domicile ou Dominique Cottrez avec huit cadavres de bébés cachés dans sa maison, les néonaticides seraient-ils en augmentation ? Deux chercheurs de l’Inserm estiment que ces meurtres d’enfants par la mère le jour de leur naissance seraient en tout cas largement supérieurs aux statistiques officielles. Leurs travaux publiés dans l’édition Fetal & Neonatal de la revue Archives of Disease in Childhood permettent également d’identifier les caractéristiques sociales et psychologiques des mères auteurs de néonaticides.

Inventé dans les années 70 par Philip J.Resnick pour définir les

infanticides survenant dans les premières 24 h de vie, le terme “néonaticide“ bénéficie d’un traitement médiatique qui privilégie souvent le sensationnalisme. Mais on dispose de peu de données quant à son ampleur ou son évolution. Les chercheurs Anne Tursz et Jon M. Cook ont recensé les néonaticides dans 26 tribunaux de 3 régions françaises (Bretagne, Ile-de-France, Nord-Pas de Calais), comportant plus d’un tiers des naissances du territoire métropolitain entre 1996 et 2000. Résultat : Par recoupement avec les statistiques officielles de mortalité*, cette analyse a permis mis en évidence une sous-estimation globale des néonaticides. Les chercheurs rapportent ainsi 2,1 néonaticides sur 100 000 naissances contre 0,39 dans les statistiques officielles, soit 5,4 fois plus de néonaticides dans les données judiciaires ! Sur un total de 27 cas (dont 9 où la mère n’a jamais été retrouvée), les chercheurs avancent un profil des mères étant à l’origine de ces décès. Agées en moyenne de 26 ans, elles vivaient pour plus de la moitié avec le père de l’enfant, un tiers avait au moins 3 enfants. Les deux tiers avaient une activité professionnelle, elles n’étaient pas désocialisées ni ne présentaient de troubles mentaux caractérisés. Leur catégorie socioprofessionnelle ne différait pas de celle des femmes de la population générale. Ces femmes avaient peu confiance en elles, présentaient une certaine immaturité, des carences affectives, une forte dépendance à l’autre, voire une peur extrême de l’abandon. Aucune contraception n’était utilisée du fait d’un manque de connaissances, d’une utilisation irrégulière ou d’un refus de principe. Toutes les grossesses ont été cachées à la famille et aux amis. Mais aucun cas de “déni de grossesse“ (non prise de conscience du fait d’être enceinte) n’a été constaté. Enfin, la plupart des femmes ont mis l’enfant au monde en secret, seule. Aucune naissance n’a été déclarée à la sécurité sociale ni suivie médicalement.Selon les auteurs, les résultats de cette étude ouvrent de nouvelles perspectives en termes de prévention. Pour Anne Tursz, “identifier le profil de ces mères permettra de mieux cibler à l’avenir les femmes vulnérables afin de leur proposer des solutions adaptées. Les données recueillies suggèrent que l’action préventive exclusivement tournée vers les jeunes, les pauvres, les femmes seules, sans emploi ou avec un déni de grossesse, comme on le voit dans les médias, n’est pas appropriée“. David Bême
Sources :
– A population-based survey of neonaticides using judicial data – Tursz A., Cook J. – Arch Dis Child Fetal Neonatal Ed Published Online First: 6 December 2010 doi:10.1136/adc.2010.192278

(abstract accessible en ligne)
– Communiqué de l’Inserm – 8 décembre 2010Click Here: cheap all stars rugby jersey